Nara

Soumis par pierre-yves le mar, 06/04/2010 - 23:34

Nara

fut instituée capitale pour une courte période, de 710 à 714. C'est dans ce court laps de temps qu'ont été construits le temple Ko-fu-kuji et l'école Hosso, dont les statues sont visibles au Grand Palais.

Lors de l'inauguration du temple, on fit des libations avec des bols en bronze décorés de rinceaux chinois (kara-kusa), car les artistes se contentaient d'imiter l'art chinois.

En 1180, le temple est incendié lors d'une bataille, puis reconstruit. Mais, par manque d'argent, les moines décident de voler une grande statue de Bouddha assis, haute de 2,8 m (s'il était debout, il mesurerait 5 m). En 1411, le temple brûle à nouveau. Seule la tête du Bouddha est sauvée.

Cette tête est caractéristique de la statuaire bouddhiste : elle a le crâne pointu, comme celle du prince Siddharta Gautama, et un rond au dessus du nez, représentant la touffe de poils du prince. Il a les lobes des oreilles déformés, par le poids des boucles d'oreilles qui se portaient à l'époque du prince. Parfois, on met des escargots dans ses cheveux, parce que, d'après la légende, durant sa méditation, le prince resta longtemps immobile et insensible aux escargots qui envahirent sa chevelure.

Comme on le sait, le prince rechercha dans la méditation la voie de la libération des réincarnations. Il ne prôna nullement une religion, mais il eut des disciples, comme Jésus, qui codifièrent la religion bouddhiste (le Grand Véhicule). Le temple montre ces 10 disciples en "laque sec". Ce procédé est très complexe. Il permet de façonner des statues légères (40 kg pour 2 m de hauteur), donc mobiles (pour les déplacements rituels), et insensibles aux variations d'hydrométrie. On réalise d'abord une statue en bois et argile, par forcément d'un seul tenant. Les membres ou la tête sont des morceaux fixés au corps principal. La statue est ensuite enrubannée de chanvre laqué. On en met plusieurs couches, jusqu'à 1 cm d'épaisseur. Entre chaque couche, on laisse sécher plusieurs semaines. Lorsque la surface est bien dure, on évide le centre en bois et on remplace le vide par une armature de renforcement. L'objet est prêt pour la finition. La dernière couche comprend de la laque additionnée d'argile, pour le modelage des détails. On laisse sécher en atmosphère contrôlée pendant 8 mois. Le résultat est une statue au modelé fin qui permet des expressions de visages plus vivantes que la sculpture en bois. Elle peut être peinte et rehaussée d'or. La laque qui a servi à sa confection devient UN "laque sec".

Bouddha est représenté dans divers états, prodiguant divers messages, que symbolisent ses gestes (mudra). Par exemple le Bouddha Yakuchi (le maître aux remèdes) est assis en position du lotus et avance la main droite, la paume vers nous, ce qui signifie "je n'ai pas de crainte" (abbaya mudra).

Il est traditionnellement entouré des généraux qui le protégèrent des démons et des danseuses dénudées. Ceux-ci ont des traits hindous, caractérisés par un nez droit et des cheveux bouclés sous un casque rond. Ils ont des yeux à faire peur aux enfants et sont armés, comme celui là qui vérifie le tranchant de son épée.

Les rois célestes qui symbolisent les quatre points cardinaux, sont eux aussi d'origine hindoue. L'un d'eux porte un trident, un autre tient un stupa miniature (reliquaire) en forme de fleur de lotus retournée.

Le panthéon accueille aussi les dieux hindous, Brahma, Vishnou, car le bouddhisme découle de l'hindouisme, comme la chrétienté découle du judaïsme.

Enfin, les boddhisattvas sont ces êtres qui, à force de sagesse et de méditation, approchèrent du stade idéal (le nirvana), mais ils renoncèrent au dernier moment pour faire profiter les hommes de leur sagesse. On les montre efféminés, couverts de bijoux. S'ils portent une fleur de lotus, celle-ci est fermée. Il n'y a que Bouddha qui tient une fleur épanouie.

Le méditant parcourt le temple, de statue en statue, en récitant des prières (mandra). Mais, il peut se recueillir seul, dans l'isolement. Pour imaginer mentalement qu'il se déplace dans le temple, il fixe un mandala (peinture sur soie), qui reproduit le temple et les étapes de prière. Les kamis sont des esprits de la religion shinto, qui peuvent aider à approcher Bouddha. On les reconnaît à leur monture à moins qu'ils ne soient eux-mêmes animal (par exemple, un cerf).

Pierre-Yves Landouer, novembre 1996, Grand Palais