Paris : Laboratoire aérodynamique de Gustave Eiffel

Soumis par pierre-yves le mer, 21/04/2010 - 17:43

A l’âge de 60 ans, Gustave Eiffel se retire des affaires et décide de consacrer à étudier l’aérodynamique de structures, pour faire avancer la science qui lui a fait défaut tout au long de sa carrière de constructeur d‘ouvrages métalliques.

 

Il équipe un laboratoire d’aérodynamique dans un hangar sous la tour dont il est propriétaire et qui, déjà, porte son nom : la tour Eiffel.
En 1911, la Ville de Paris parvient à récupérer l’exploitation de la tour et le chasse.
Eiffel a 79 ans à ce moment et ne veut pas s’arrêter de travailler. Un ami lui propose de lui vendre un terrain qui n’est alors qu’un maraîcher au  67 rue Boileau. Il déménage sa machine de soufflerie.
Il meurt à 91 ans, en 1923, 4 ans après avoir abandonné l’exploitation du laboratoire d’aérodynamique à son gendre.
Ses 4 dernières années, il les consacre  rédiger ses mémoires / on apprend que ses ancêtres étaient allemands, et s’appelaient Beninghausen. Au XVIIIè siècle, un Beninghausen émigre à paris, où il fait profession de tapissier. Son nom est un peu dur à prononcer. Aussi se fait-il appeler « Eiffel » du nom d’un massif montagneux proche de son village d’origine.
Son fils est hussard dans l’Armée napoléonienne, et mit au rencart sous le nouveau régime. En 1824, il est en poste à Dijon, et s’y marie avec Marie-Mélanie Moneuse. De leur mariage naîtront 2 enfants, une fille et Gustave en 1832
Son père quitte l'armée et sa femme doit travailler pour gagner assez d'argent pour ka famille. Elle se lance dans la vente de charbon d'une mine proche. Le charbon devient le combustible principal pour le chauffage et aussi pour les locomotives.
Les affaires tellement bien que son mari la rejoint dans sa société.
Gustave est élevé chez les grands-parents Moneuse.
En 1843, les Eiffel sont assez riches et ils se retirent des affaires : ils placent leurs avoirs dans une brasserie et achètent un château comme il en existe beaucoup en France. Des rentiers !
Pour ses études, Gustave 'monte' à Paris et fréquente le collège Sainte-Barbe. Il intègre ensuite l'école centrale de Paris, en 1850. Il ne cessera de correspondre avec sa mère très régulièrement jusqu'à la mort de sa mère, en 1878. On connaît ainsi de nombreux détails de sa vie privée.
Il se spécialise dans la métallurgie, qui est la technique en pointe de cette époque. Il réalise d'abord des travaux aux chemins de fer : sa société fait faillite et est reprise par une compagnie belge, Pauwils. Il construit ainsi le pont de chemin de fer de Bordeaux sur la Garonne. Célibataire, il demande à sa mère de lui trouver une femme de chez lui ! Elle lui trouve Marie-Mélanie Gaudelet, qui fera une excellente épouse et lui fera 5 enfants. C'est la propre petite-fille du brasseur qui gère la brasserie des Eiffel.
Gustave monte dans la hiérarchie, est nommé Directeur de l'usine de Levallois. En 1865, l'entreprise fait faillite à son tour. Gustave décide de voler de ses propres ailes et fonde sa société de construction métallique. Il bénéficie du soutien financier de connaissances faites à Bordeaux.
1877 est une année noire : sa femme meurt lui laissant les 5 enfants dont l'aînée a 12 ans. En 1878, sa mère meurt. En 1879, il perd son père. Sa sœur Marie va désormais l'aider à élever les enfants. Ils habitent un hôtel particulier rue Rabelais, à Paris.
Gustave Eiffel construit comme on  sait des viaducs un peu partout, et pas seulement en France. Mais l'œuvre qui le rend célèbre à jamais est la tour qui porte son nom dès sa construction : la tour Eiffel, élevée pour l'exposition universelle de 1889. Sa vocation initiale est d'aider les mesures de météorologie, et de vent en particulier. Le vent a toujours été l'ennemi n°1 de Gustave Eiffel, car on n'en connaît pas bien les effets.
Il construit donc le laboratoire d'aérodynamique sous la tour Eiffel et se consacre à l'étude des effets du vent. Il a été mouillé dans le scandale de Panama car il a livré des écluses. Cette mise en cause a contribué à le décider de se retirer des affaires. Il est même condamné à 2 mois de prison. Le procès est cassé après recours.
Son gendre Adolphe Salle prend la suite. Gustave Eiffel anticipe le rôle que pourrait jouer l'aviation dans des conflits armés.
Dès 1903, G Eiffel a eu l'idée de tester des avions : il pensait les faire évoluer depuis le premier étage de la Tour, sur 500 m, le long d'un câble tendu depuis le sol. La soufflerie permet de simuler correctement les réactions et de les mesurer, en modèle réduit au quart. La soufflerie peut simuler un vent de 100 km/h. En 1960, ce marché de tests aéronautiques s'arrête.
Tout au long du XXè siècle, la soufflerie réalise des tests en fonction des besoins exprimés par l'industrie :
Vers 1917, on teste des hangars à dirigeables, des voitures (Opel, Peugeot, Panhard, Fiat, Chrysler), plus tard des vélos. Pour les jeux olympiques de sport d'hiver de 1968, on teste la position des descendeurs ("œuf avancé") et la rugosité de leurs vêtements. En 1969, Porsche fait tester ses voitures de course qui évoluent à 300 km/h sur piste. Audi confie son Audi 100. La soufflerie Eiffel acquiert une excellente réputation de qualité et aussi de confidentialité. Mais progressivement les constructeurs automobiles s'équipent de souffleries spécialisées. La particularité de la soufflerie Eiffel est de s'adapter à divers types d tests. Cet avantage devient un handicap quand il s'agit de réitérer une configuration unique de tests.
Les règles de construction des bâtiments sont affinées dans la soufflerie, jusqu'aux nouvelles règles basées sur les turbulences : le test de turbulences est assez complexe à effectuer et la soufflerie fait normalement du flux linéaire.
Plus récemment, le laboratoire a simulé l'effet du vent sur les émissions des cheminées d'usine, et des ventilations des grands immeubles de la Défense, ceci afin délimiter la pollution sur les riverains. Le laboratoire réalise lui-même les maquettes, dont la plupart sont conservées, en souvenir. Les matériaux utilisés sont le plastique, le plexiglasse, la résine (très lourde : une maquette de 80 cm de long, d'une voiture est difficile à soulever !). Auparavant, on utilisait du bois. Toute la difficulté est de mesurer l'effet du souffle : soit on met un capteur, mais il risque d'influer sur la mesure en détournant le vent. On a testé diverses injections, de fumée (de pipe !), de micro bulles de savon, qui, elles présentent l'avantage que si on fait une photo avec un stroboscope, dont la période est connue, on peut calculer la vitesse des bulles. Pour conclure, on a vraiment eu l'impression que les successeurs de Gustave Eiffel ont un esprit scientifique et inventif rare, débrouillard, merveilleusement adapté pour répondre à toutes les questions.

 

Pierre-Yves Landouer, avril 2002